Le temps passe si vite. Il y a un an, je préparais mon voyage imminent en France et depuis, je n’ai jamais pris le temps d’écrire à nouveau dans ce blog. C’était pourtant écrit sur ma longue liste de choses à faire, mais toujours relégué à la fin. Le jardinage dans différentes parties de la propriété étant une tâche sans fin, je devais constamment revoir mes priorités.
Par où commencer ? La France, évidemment. Covid ayant repoussé mon voyage initial, ça faisait trois ans que je n’y étais pas retournée. C’était une grande première pour Louis mon petit garçon. Il allait enfin rencontrer la deuxième moitié de sa famille, le côté français. Arrière-grands-mères, tantes, oncles, cousins... Les amis aussi. Il y avait du monde à présenter. Je doute qu’il se rappelle de tout le monde mais nous y travaillons en regardant régulièrement l’album photos de nos vacances.
On oublie tellement en trois ans. Tous ces petits détails bien français me sont réapparus d’un coup. L’ambiance d’été d’abord. Les longues journées qui s’étirent jusqu’à presque 22 heures. Le chant des oiseaux est différent, l’odeur et la couleur des fleurs. Même les gros cumulus dans le ciel normand m’avaient semblé être un lointain souvenir. Et puis il y a les repas : le melon en entrée, le rosé comme boisson, le plateau de fromages et la baguette entre le plat principal et le dessert, les pâtisseries... le tout accompagné de conversations animées qui trainent jusqu’après le café (sans lait) qui marque la fin du déjeuner.
Louis a passé d’excellentes vacances. Simon, son père, lui a manqué mais rien, dans ce nouveau contexte, ne lui remémorait des souvenirs passés avec ce dernier. Nous étions en France à un moment de la vie de Louis où il commençait à vouloir communiquer. Son immersion dans la langue française l’a fait revenir en Australie avec une aisance pour le français bien plus développée que celle qu’il avait pour l’anglais. Il lui a bien fallu 5 mois pour équilibrer son niveau d’anglais avec celui du français. Pendant les premiers mois qui ont suivi notre retour de France, Louis parlait exclusivement en français. A tel point que son père me demandait régulièrement de faire la traduction. Un an plus tard, je dirais que l’anglais a pris l’avantage (dans les jeux, les chansons, les altercations avec les gens...) mais je veille à ce que Louis et moi communiquions toujours en français. Malgré une grammaire un peu bancale (“tu peux me tiendre mon doudou ?”) et un mélange des deux langues dans la même phrase, il s’en sort plutôt bien pour un enfant qui n’a, comme référent dans son apprentissage du français, que sa mère.
Ce petit australo-français a maintenant 3 ans et demi. Son caractère s’affirme. Il nous fait rire quand il imite les réflexions de grands, il nous énerve lors des bagarres pour s’habiller, prendre son bain ou se laver les dents, il nous attendrit quand il vient se blottir le matin entre nous deux dans notre lit et il nous impressionne quand il élabore des structures improbables avec ses jouets de construction. Bref, nous sommes comme la plupart des parents, devant leurs enfants…
De mon côté, j’ai enfin cessé mon activité au
café de la
maison de retraite. Je m’étais toujours dit qu’il serait temps d’arrêter de travailler dans la
restauration quand j’aurai passé les
40 ans. L’occasion s’est présentée quand, à mon retour de France, la
nounou de Louis m’a annoncé qu’elle ne travaillait plus le mardi. Le jeudi allait donc être le seul jour où je pouvais travailler sans me préoccuper du
mode de garde pour Louis. Pour seulement quatre heures de travail, payées au salaire minimum, à 20 minutes de chez moi en voiture, j’ai décidé que ça ne valait pas la peine de continuer. J’allais donc me concentrer davantage sur le
Airbnb et les
leçons de français. Simon a conçu un site
internet destiné à me faire connaître en tant que “
French tutor” . J’ai maintenant
cinq étudiants. Ils ont entre 20 et 60 ans (femmes et hommes) et ont un niveau en français très varié. J’apprécie énormément ces moments avec mes étudiants. Les leçons ont lieu dans la
cabane et elles se passent toujours dans la
bonne humeur et j’ai ainsi fait la connaissance de personnalités différentes qui sont même devenues de bons amis. Nous avons donc trois sources de
revenus, les leçons de français, le Airbnb et les
sites internet de Simon.
Financièrement, on s’en sort tout juste mais nous avons une qualité de vie extrêmement riche. L’été dernier a été paradisiaque. Avec Louis qui commence maintenant à nager, nous avons trouvé ce petit coin de paradis à deux pas de chez nous à l’embouchure d’une rivière avec l’océan. En fonction de la marée, le contour de la lagune change et peut se transformer tantôt en piscine d’eau turquoise tantôt en rivière sauvage. Idéal quand on craint les vagues déchaînées de l’océan cinquante mètres plus loin.
Le jardin nous demande beaucoup de travail mais nous en récoltons chaque jour les bénéfices rien qu’en le contemplant. Je suis en revanche encore trop débutante avec le potager. J’aimerais pouvoir récolter toute l’année des légumes fraîchement poussés mais j’ai encore beaucoup à apprendre. En revanche, nous avons eu plus de chance avec les fruits. Au fil de l’année, nous avons cueilli des fraises, des figues, des goyaves, des framboises et maintenant toutes sortes d’agrumes.
Simon a planté, depuis notre arrivée sur les lieux, pas moins de 300 arbres natifs d’Australie. Tous n’ont pas survécu mais la plupart ont maintenant atteint une taille mature et attirent de nombreux et adorables petits oiseaux. En ce moment même, je n’ai qu’à lever les yeux pour observer de minuscules honeyeaters se délecter du nectar des grevilleas.
Malgré l’arrivée de l’hiver, nous avons toujours de magnifiques journées ensoleillées. Il fait 32°C en plein soleil vers midi. En revanche, les journées sont courtes et les maisons pas toujours bien chauffées. Il a beau faire chaud dehors, les intérieurs n’ont pas le temps de se réchauffer et le froid ressenti avoisine les 10°C. Un petit feu de cheminée est de rigueur vers 17h et il est difficile de sortir de son lit douillet le matin au réveil. Moi qui ai l’habitude de fêter mon anniversaire au printemps en France, j’ai eu du mal à passer le cap d’une nouvelle année dans l’ambiance rafraîchie de la fin de l’automne. D’autant plus que le cap était rude, puisqu’il s’agissait de mes 40 ! Dix ans plus tôt, je n’aurais jamais imaginé passer l’ère de cette nouvelle décennie, en Australie.
Dix ans plus tôt, je n’aurais pas non plus imaginé que la vie en Australie se transformerait en une routine assez proche de celle que j’aurais pu avoir en France. Je ne le regrette pas, loin de là. Organiser la semaine de la même façon c'est pour moi rassurant. Les saisons, en revanche, ont un fort impact sur l’organisation globale de l’année. L’été, l’occupation du Airbnb bat son plein. Je suis donc de service presque tous les jours pour préparer le bus avant l’arrivée des nouveaux occupants. Les journées sont longues et la météo nous permet d’aller chaque jour à la plage. En hiver, en revanche, tout est au ralenti. Les vacanciers se font rares. A 19h, on a souvent fini de manger et on espère que Louis s’endorme vite pour aller nous mettre au lit.
Rien de bien différent donc, de la vie à la française. Toutefois, certaines différences culturelles persistent. Je réfléchis à commencer une liste qui pourrait peut-être faire l’objet d’une nouvelle rubrique dans ce blog. Après presque 10 ans passés en Australie, je pense m’être bien adaptée et je n’éprouve plus autant le besoin de partager ce qui me semblait si nouveau et hors du commun quand j’ai commencé ce blog. Pour continuer à le faire vivre, je vais donc devoir lui trouver une toute nouvelle orientation.