Déjà trois mois que j'ai commencé mon nouveau travail. Même si c'est loin d'être un job de rêve, je me réjouis de gagner enfin un peu d'argent.
Le réseau est définitivement un bon moyen pour décrocher un emploi quand on vit au sein d'une petite communauté qui s'entraide volontiers. Une personne rencontrée aux Boomerang Bags m'a conseillée d'aller déposer mon CV à la résidence services de la petite ville à 15 min en voiture de Valla. Plusieurs semaines plus tard, alors que c'était déjà sorti de ma tête, j'ai reçu un coup de téléphone qui a abouti sur un entretien très informel (ils avaient désespérément besoin de personnel). Une semaine plus tard, juste le temps pour eux d'étudier mon extrait de casier judiciaire et de vérifier mes références, je commençais à travailler à la maison de retraite.
Celle-ci se divise en trois structures. La première est composée de maisons individuelles où les résidents sont complètement autonomes. C'est un petit village de retraités dans lequel le personnel n'intervient que pour faire le ménage et s'assurer que les résidents vont bien. Il y a ensuite la partie intermédiaire où les résidents vivent dans une chambre avec salle de bain et partagent une cuisine qu'ils utilisent rarement. Leurs repas sont servis au réfectoire. Puis la dernière partie, celle dans laquelle je ne sais pas trop ce qui s'y passe et où j'espère ne jamais travailler. Là-bas les résidents ont besoin d'assistance et de soins. Malheureusement, il n'y a plus d'autre structure où aller ensuite...
J'alterne avec deux postes différents.
Dans le premier, je m'occupe de servir le thé puis le dîner pour les résidents de la partie intermédiaire. Je prépare les sandwichs, les salades et je sers le repas chaud. Un cauchemar quand il faut prendre en compte toutes les requêtes alimentaires des résidents. Firmin ne veut pas d’œufs, Margret veut sa viande coupée, David est allergique aux tomates, Colin est diabétique, Norma est intolérante au lactose, Rita ne veut rien avec de la mayonnaise... Bref préparer des salades n'a jamais été autant un casse tête.
Enfin, quand je regarde l'heure et me dis que cette fois je vais enfin pouvoir finir à l'heure, j'ai souvent une résidente qui passe une tête dans la cuisine pour me dire qu'elle est perdue et qu'elle ne sait plus où est sa chambre. J'essaie désespérément de trouver une aide soignante pour prendre en charge la pauvre dame. Malheureusement l'Australie comme la France semble manquer cruellement de personnel soignant et bien souvent je perds un temps fou à ramener les résidents à leur appartement (les déambulateurs ne les font pas aller plus vite).
Au delà du côté répétitif et un peu ingrat de ce travail, je côtoie des petits vieux adorables qui me donnent du baume au cœur quand je me demande parfois ce que je fais là. Par leurs petites phrases bienveillantes et les compliments sur mon sourire je me dis que j'arrive peut-être à égayer leurs journées moroses et identiques (le sourire étant un bon moyen de communication quand on ne comprend rien aux marmonnements en anglais) .
Quand je ne travaille pas au repas du soir, je suis au café en tant que barista. Mon expérience dans la boulangerie française à Melbourne pendant mon working holiday visa m'a été profitable. L'ambiance est complètement différente car je travaille toujours en équipe avec en alternance deux charmantes collègues. Il y a des moments de rush où j'ai une dizaine de commandes à gérer le plus vite possible. Enfin, j'ai même la possibilité de faire un peu de pâtisserie. La clientèle est composée de 45% de résidents, 45% du personnel de la maison de retraite et 10% de gens extérieurs.
Après l'obtention de ce travail, je me suis achetée une voiture. La première de toute ma vie. Avoir un revenu régulier et un moyen de locomotion m'a procuré un grand sentiment de liberté. Je me sens également beaucoup proche de la population locale. Je m'arrête maintenant dans la rue pour discuter avec certains passants que je connais du travail, du yoga, des Boomerangs bags... L'intégration dans la communauté environnante se passe au mieux.
J'espère en revanche que ce travail ne sera que provisoire. Mon égo est mis à rude épreuve. Passer d'un emploi dans un grand groupe de presse parisien à un emploi qui consiste à être "la dame de la cantine" aux yeux des résidents de la maison de retraite n'est pas toujours facile à vivre.
D'autant plus, que la motivation pour continuer mes créations pour le marché, jardiner , bricoler où même écrire dans ce blog me lâche un peu après les journées de travail. J'ai également la chance d'avoir mes parents à la maison pour encore un mois et j'aimerais bien profiter de leur présence avant de ne plus les voir pendant plusieurs longs mois.